Le Dernier Contrat - Point zéro (Chapitre 5 et 6)


Chapitre 5 – L’Évidence

Le silence avait envahi l’appartement comme une pierre tombale. Samuel, à genoux au milieu du salon. Les corps avaient été emportés par la police, après sa découverte. Les voisins avaient parlé, le ruban jaune avait scellé l’entrée. Mais dans sa tête, tout était figé : Claire et Tom, impossibles.

Quarante-huit heures sans dormir. À la cuisine, Samuel rejouait mille fois la nuit du contrat : l’homme à table, les silhouettes au couloir, la main qui presse la détente. Deux coups. Nets. La règle.

Cette fois, la règle l’avait détruit.


Flash-back : Les anniversaires

Tom, chapeau en papier, soufflant les bougies avec sérieux. Claire, mains sur ses épaules, riant. Samuel, appareil photo à la main. Odeur de chocolat et de café. Ce jour-là, Samuel avait pensé : « Si je dois mourir, ce serait avec cette image. »


Mais il avait tout sali de ses propres mains.

Samuel se redressa, sortit un vieux carnet. Il nota : chaque contrat reçu depuis cinq ans. Lieux. Dates. Descriptions. Il n’avait jamais cherché à comprendre. Mais il avait tout noté — par habitude, par instinct. Un carnet discret, jamais relu. Jusqu’à aujourd’hui.

Il chercha un schéma, un motif.

Certains contrats semblaient isolés. D’autres reliaient des familles, sociétés, politiques.

À la marge : son propre nom, son adresse, comme le centre d’une toile.

Il comprit. Il n’avait jamais rien choisi.

Il avait exécuté un dessein plus grand, qui l’engloutissait à présent.

La nuit avançait : cette certitude devint poison. Un visage sans traits se formait. Celui qui tirait les ficelles.

Les SMS laconiques : Numéro. Adresse. Heure. Jamais de voix, jamais de visage. L’homme derrière tout ça voulait, cette fois, le briser. 

Samuel connaissait ces esprits-là : patients, stratèges. Si cet homme l’avait visé, il avait un plan.

Mais Samuel ne voulait plus que lui rendre la pareille.

Il se leva.

Ouvrit un tiroir. Sortit un vieux revolver S&W. Le nettoya lentement — non pas pour tuer, mais pour se souvenir.

Dans le reflet de l’acier, il ne vit plus d’hésitation. Plus de vide.

La chasse allait commencer.


Chapitre 6 – Le Fil Noir

La nuit remplaça le sommeil. Samuel traçait, reliait, recomposait. Les murs de l’appartement s’étaient couverts de carnets ouverts, de schémas griffonnés, de fils rouges tendus comme des nerfs.

Il écumait les bars de banlieue, les vieux réseaux, les visages oubliés :

— Qui donne les gros contrats ? Qui passe aujourd’hui par un homme sans visage ?

Les réponses se dérobaient. Certains détournaient les yeux, d’autres se muraient dans le silence, comme s’ils craignaient de nommer ce qu’ils savaient.

Alors Samuel se souvint. De ceux qu’il avait croisés, utilisés, laissés derrière. Des ombres avec des dettes, des secrets. Parmi eux, Anton.

Un soir, dans l’arrière-salle d’un bar où la lumière ne touchait plus les murs, Anton apparut. Vieilli, nerveux, mais toujours lucide.

Il s’approcha, glissa quelques mots sans préambule :

— Si tu le cherches, c’est qu’il t’a déjà trouvé.

Samuel ne répondit pas. Mais cette phrase s’incrusta. Comme une lame lente.

Anton portait une chevalière noire, gravée d’un pion d’échecs. Samuel la reconnut. Il l’avait déjà vue. Sur un dossier. Sur un mur.


Flash-back : Les soirs de pluie

Claire préparait toujours un chocolat chaud, déposait la tasse devant Samuel, s’asseyait près de lui. Tom grimpait entre eux avec son livre préféré. Leur refuge : chaleur, odeur, silence, loin du monde.

Samuel ferma les yeux. Ressentit la tasse. Le calme.

Rouvrit les yeux. L’appartement vide.

Un soir, une piste s’offre enfin : une société-écran, une adresse, un club privé en sous-sol d’un entrepôt.

C’est le début de la chasse ouverte.


A suivre...

Antoine le 12 Aout 2025

 

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